Homélie de Monseigneur Philippe OUEDRAOGO lors de l'ordination presbytérale du 7 juillet 2012 à la Cathédrale de l'Immaculée Conception

- Excellence, Mgr Jean-Marie COMPAORE,

- Excellence, Mgr Léopold OUEDRAOGO,

- Chers Prêtres, religieux, religieuses, catéchistes

- Chers Frères et Sœurs,

La grâce et la paix de Notre Seigneur Jésus-Christ soient toujours avec vous !

Oui ! En vous souhaitant la paix du Seigneur, je voudrais traduire aux uns et aux autres un salut cordial, une chaleureuse bienvenue et la sincère gratitude de notre Eglise Famille de Dieu de Ouagadougou.

Merci à tous d’être là, si nombreux, pour cette célébration au cours de laquelle nous allons conférer l’ordination presbytérale à onze diacres : Deux diocésains, trois rédemptoristes, quatre camilliens, un frère de la Sainte Famille et un Pavonien, fils de Marie Immaculée.

Nous saluons et félicitons les paroisses et les Instituts religieux qui présentent des candidats pour l’ordination presbytérale. Permettez-moi de saluer particulièrement les frères de la Sainte Famille qui présente pour la première fois un frère de la Vice Province Ste Anne pour l’ordination sacerdotale. Je salue également le Supérieur Général des Pavoniens de Milan, fils de Marie Immaculée que nous avons accueilli dans notre Archidiocèse voilà bientôt deux ans. L’ordination sacerdotale du Père Pierre Michel TOWADA TOWADA, camerounais, constitue un signe d’espérance pour une implantation féconde en Afrique.

A vous tous ici présents : Autorités ecclésiastiques, autorités administratives et politiques, judiciaires et militaires, coutumières et religieuses... aux parents et amis des élus de ce jour.... à tous et à toutes, merci pour votre présence effective, votre amitié réconfortante, votre prière fraternelle.

Chers Frères et Sœurs, réunis pour célébrer des ordinations sacerdotales, après avoir accueilli la Parole de Dieu, arrêtons-nous quelques instants pour contempler, méditer et comprendre la nature et la signification du sacerdoce ministériel que nous allons conférer ce soir à onze diacres.

1) La nature du sacerdoce

Disons-le tout de suite, être prêtre n’est pas une carrière qu’on embrasse ; ce n’est point pour se procurer une position sociale, une promotion sociale ou un avantage quelconque... grâce à l’Eglise. On ne devient pas prêtre pour devenir quelqu’un, pour devenir important... ce n’est pas un métier non plus ! On devient prêtre par pure grâce de Dieu pour servir à la suite de Jésus. Dans la première lecture, à l’instar de tant d’autres appelés avant lui, Jérémie éprouve l’irruption inattendue de Dieu dans sa vie. Il reçoit la mission de déchiffrer le projet de Dieu sur son peuple dans les évènements immédiats. Cette mission dépasse les forces du prophète, mais la force de Dieu agira en lui...

La vocation, sacerdotale ou religieuse, n’est rien d’autre qu’un don gratuit de Dieu pour le service de l’Evangile, de l’Eglise et du monde. Le Concile Vatican II nous rappelle avec clarté ce que signifie être prêtre : « Participant pour leur part à la fonction des apôtres, les prêtres reçoivent de Dieu la grâce qui les fait ministres du Christ Jésus auprès des nations, assurant le service sacré de l’Evangile, pour que les nations deviennent une offrande agréable, sanctifiée par l’Esprit Saint » (Presbyterorum Ordinis, n°2).

Coopérateurs nécessaires des évêques, tous les prêtres participent à la fonction des Apôtres, et cela dans le domaine majeur et prioritaire de l’annonce de l’Evangile à tous ceux qui ne participent pas encore à la vie divine en Jésus Christ.

Le sacrement de l’ordination sacerdotale constitue une Véritable consécration qui confère l’autorité et le devoir de proclamer l’Evangile de Jésus et de prêcher au nom de l’Eglise. En outre, il revient aux prêtres de gouverner et de sanctifier en renouvelant le sacrifice du Christ, célébrant la sainte Eucharistie « qui contient tout le trésor spirituel de l’Eglise, i.e. le Christ lui-même, lui notre pâques, le pain vivant qui donne la vie aux hommes » (Presbyterorum Ordinis, n°5). Par l’Eucharistie et les autres sacrements, le prêtre fait advenir dans le monde le salut, par une vie consacrée à Dieu sous l’emprise de l’Esprit Saint.

Chers frères et sœurs, l’évangile de la présente célébration n’est rien d’autre qu’un extrait du discours, relatif au dernier repas de Jésus avec ses disciples. Ce passage nous ramène à l’intimité du Cénacle. C’est là que le Christ, au cours de la dernière Cène, institua le sacrement de l’Eucharistie et le sacerdoce de la Nouvelle Alliance et qu’il laissa aux siens le « nouveau commandement de l’amour ».

Les paroles du Seigneur s’adressent à ses disciples, à tous les baptisés, mais d’une manière particulière aux onze diacres, invités ce soir à recevoir le sacerdoce qui n’est rien d’autre qu’un testament d’amour et de service.

Selon une belle et émouvante affirmation du curé d’Ars : « Le sacerdoce est l’amour du cœur de Jésus ».

2) A la suite de Jésus, le prêtre donne sa vie

Jésus a donné sa vie par sa Passion-Mort-Résurrection. Et dans la sainte Eucharistie, il continue de réaliser cela chaque jour ; il se donne lui-même à travers les mains du prêtre. C’est pourquoi, au centre de la vie sacerdotale se trouve la sainte Eucharistie, dans laquelle le sacrifice de Jésus sur la croix demeure sans cesse présent réellement parmi les hommes. Tout prêtre doit s’évertuer à célébrer quotidiennement la Sainte Eucharistie selon les normes liturgiques d’une manière adéquate et avec une fervente dévotion. Ainsi toute sa vie sera centrée sur l’Eucharistie, célébrée, adorée parce qu’il est "un océan d’amour" où Jésus se donne complètement et pour toujours. En outre, celui qui accepte librement de recevoir ce sacrement, se donne totalement au Christ, afin qu’il dispose de lui pour un service d’amour. Parmi les qualités les plus indispensables pour le ministère des prêtres, il faut mentionner :

- La disponibilité intérieure qui leur fait rechercher non pas leur propre volonté, mais la volonté de celui qui les a choisis, appelés et envoyés.

- L’humilité et l’obéissance modèlent le prêtre à l’image du Christ qui s’est « dépouillé lui-même en prenant la condition de serviteur... en se faisant obéissant jusqu’à la mort » (Phil 2, 7-9). C’est l’obéissance de Jésus qui a valu justice et salut à la multitude (Rm 5, 19).

- Une autre qualité prophétique pour la vie sacerdotale est le choix et l’acceptation du célibat et de la continence parfaite à cause du royaume des cieux. Le célibat a de multiples convenances avec le sacerdoce. La mission du prêtre, c’est se consacrer tout entier au service de l’humanité nouvelle que le Christ, vainqueur de la mort, fait naître par son Esprit dans le monde. En gardant la virginité et le célibat pour le royaume des cieux, les prêtres se consacrent au Christ d’une manière nouvelle et privilégiée ; il leur est plus facile de s’attacher à lui avec un cœur sans partage ; ils sont plus libres pour se consacrer en lui et par lui, au service de Dieu et des hommes...

Dans cette perspective, le Pape Benoît XVI exhorte les prêtres en ces termes : « Edifier vos communautés chrétiennes par votre exemple en vivant dans la vérité et la joie vos engagements sacerdotaux : le célibat dans la chasteté et le détachement des biens matériels ». (111) Vécu avec maturité et sincérité, ces signes qui sont particulièrement conformes au style de vie de Jésus, expriment « le don total et exclusif au Christ, à l’Eglise et au Règne de Dieu. » (Africae munus, n°108).

Le célibat, la continence parfaite sont un don de Dieu et ils ne sont jamais refusés à ceux qui savent les demander humblement et instamment (Presbyterorum Ordinis, n°16). A la suite du Concile Vatican II, au nom du peuple de Dieu, nous rendons un vibrant hommage et exprimons notre admiration et encouragement à tous les prêtres qui ont librement et volontairement accueilli le célibat selon l’exemple du Christ.

Chrétiens et chrétiennes, ne soyez jamais des obstacles et des causes de tentations et de défaillance pour les consacrés, prêtres, religieux ou religieuses. Les consacrés eux aussi sont pleinement conscients qu’ils doivent être lucides et observer des règles éprouvées de prudence et d’ascèse. Tous les chrétiens doivent les accompagner de leurs prières et de leur soutien pour qu’ils s’attachent généreusement et persévèrent fidèlement dans leur vocation, pour la gloire de Dieu et le salut des hommes.

3) Le prêtre existe pour évangéliser

Après sa résurrection et avant de monter aux cieux pour retourner à son Père, Jésus a confié à ses disciples cette mission : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom Père, et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. » (Mat. 28, 19-20)

Aujourd’hui encore cette mission est urgente et actuelle. Dans le monde entier, nous comptons environ 30 % de chrétiens, catholiques et protestants confondus. Au Burkina Faso nous en comptons 25% environ. C’est dire que la tâche d’évangéliser est réelle et urgente. Et le devoir d’évangéliser incombe à toute l’Eglise, à tous les baptisés : laïcs, religieux, religieuses, catéchistes, prêtres. « Annoncer l’Evangile n’est pas un titre de gloire, c’est une nécessité qui m’incombe, oui, malheur à moi si je n’annonçais pas l’Evangile », dira l’Apôtre Paul (1 Cor.9, 16).

Chers ordinands,

Vous serez ordonnés prêtres pour l’Eglise de Dieu. Votre regard, votre coeur, votre sollicitude pastorale et missionnaire doivent s’élargir aux dimensions de l’Eglise Universelle, soyez donc disponibles, généreux et désintéressés pour servir là où l’on vous enverra. Un prêtre ne doit choisir ni son champ apostolique, ni ceux avec qui il doit vivre et travailler. Dans ce sens, cherchez à imiter Jésus Christ, qui n’est pas venu pour faire sa volonté mais la volonté de celui qui l’a envoyé (cf. Jn 6,38).

Pour réussir votre mission, entraînez-vous constamment à avoir le sens de l’Eglise (sensus Ecclesiae) - l’Eglise Famille de Dieu – le sens de l’appartenance à un presbyterium avec une fraternité sacerdotale authentique. La communauté sacerdotale ou religieuse est une planche de réussite pour tout prêtre. Il n’y a pas meilleur conseiller pour un prêtre qu’un confrère prêtre. Bâtissez ensemble des communautés fraternelles de table, de travail, de prière, de correction fraternelle. Les principaux points qui garantissent un ministère qui tient la route sont la capacité de travailler avec d’autres, l’amour de l’Eglise et du Peuple de Dieu. Le prêtre n’est jamais propriétaire de la mission qui ne s’exerce jamais de façon isolée… Le prêtre n’est pas non plus l’homme des initiatives individuelles, mais le ministre de l’Evangile au nom de l’Eglise. Chacune de ses œuvres apostoliques part de l’Eglise et revient à l’Eglise.

Chers ordinands, à l’instar de vos aînés, la vie et le ministère presbytéral doivent être caractérisés par ce que le Concile appelle avec bonheur, la charité pastorale. C’est dire que le prêtre doit être sacrement, icône, transparence de Jésus Christ, prophète, prêtre et Berger du peuple de Dieu. Le prêtre doit crier Jésus par toute sa vie, indiquer par sa vie, céder le passage à la présence vive de Jésus le Bon Berger ressuscité. Une belle expression du Bienheureux Charles de Foucauld retient que « le prêtre est un ostensoir. Sa fonction est de montrer Jésus. Il doit disparaître pour révéler Jésus. « Je dois m’efforcer, dit-il, pour laisser un bon souvenir dans l’âme de tous, vous qui venez à moi. Me faire tout pour tous : rire avec ceux qui rient, pleurez avec ceux qui pleurent, pour les conduire tous à Jésus ».

Oui ! Notre apostolat sera fécond s’il est caractérisé par la proximité et le témoignage de la charité. Les hommes et les femmes d’aujourd’hui ont plus besoin de témoins que de maîtres et ils acceptent seulement les maîtres quand ils témoignent.

Bien chers ordinands, tous vos parents et amis, toute la communauté diocésaine vous entourent avec affection et espérance. Nous prions pour vous en ce moment combien important de votre engagement définitif. Nous vous confions à la protection maternelle de la Sainte Vierge Marie, Mère des Apôtres.

Allez, prenez le large avec courage et détermination – Duc in altum – allez au large – poussés par le souffle de l’Esprit Saint, l’Esprit de la mission. Et vous serez heureux de tout ce que le Seigneur accomplira à travers votre ministère. (Ac 14,27).

Distinguez-vous par votre attachement indéfectible à Jésus Christ, avec une confiance et un abandon absolus notamment dans et par la prière constante et persévérante. Alors fera-t-il de vous de bons, fidèles et saints pasteurs pour la gloire de son nom et le salut du monde.

Amen.

+ Mgr Philippe OUEDRAOGO
Archevêque Métropolitain de Ouagadougou

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