Textes : Gn 32, 23-32; Tt 3,4-7 ; Ps 22 ; Mt 9,9-13

Révérende Mère,
Bien chères moniales,
Chers frères et sœurs en Christ,

Au début de cette année dédiée à la vie consacrée, Dieu vous donne d’accueillir dans votre famille religieuse « La Famille monastique de Bethléem et de l’Assomption de Marie et de Saint Bruno » et plus précisément dans ce monastère, une profession religieuse d’une fille de la savane africaine. Que les voies du Seigneur sont insondables ! En cette année de la vie consacrée, la lettre circulaire de la congrégation pour les Instituts et sociétés de vie apostolique, trace pour les personnes consacrées un chemin, à savoir emprunter un « itinéraire commun, lieu de réflexion personnelle, fraternelle, en institut, et en chemin vers 2015. Avec le désir et l’intention d’oser les décisions évangéliques qui porteront des fruits de renaissance et seront source de joie : La primauté de Dieu apporte à l’existence humaine une plénitude de sens et de joie, car l’homme est fait pour Dieu et il est sans repos tant qu’il ne repose en Lui ». (Réjouissez-vous, n. 1)

Chères sœurs, je vous exhorte donc à l’action de grâce ; accueillez avec joie et espérance l’événement de ce jour afin que cette profession religieuse soit source d’abondantes grâces pour vous et pour l’Église, source de nombreuses et saintes vocations dans votre famille religieuse.

I- L’événement de ce jour à la lumière de la Parole de Dieu

L’évangile choisi pour cette célébration nous situe au cœur de toute vocation et de tout appel de Dieu. Toute vocation est un don de Dieu et lui seul en a l’initiative. Dans son grand amour, il choisit des hommes et des femmes qu’il veut pour les associer à sa mission de salut. C’est l’exemple de Lévi (Mathieu) le publicain, collecteur d’impôts que Jésus appelle à sa suite : « suis-moi » et Mathieu répond promptement et généreusement. Alors, du publicain méprisé par les hommes (scribes et pharisiens), Jésus en fait un apôtre. Il s’agit ici du thème des moyens pauvres : « ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour couvrir de confusion ce qui est fort ; ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est pas, voilà ce que Dieu a choisi, pour réduire à rien ce qui est. » (1 Co 1, 27-28). Toute personne consacrée, consciente de sa faiblesse et de la grandeur de sa vocation se sent touchée par ces paroles de l’apôtre Paul, car dans son état de vie, il sied de se considérer humblement comme serviteur et instrument docile entre les mains du Seigneur. Sœur Wendyam se situe naturellement dans cette perspective à travers son engagement de ce jour. Elle a fait l’objet de la tendresse et de la miséricorde de Dieu qui l’appelle à se consacrer exclusivement à lui dans la vie monastique à l’instar de nombreux amis de Dieu.

Le patriarche Jacob qui a joué un grand rôle dans l’histoire du peuple d’Israël, se présente alors comme son exemple. La lutte de Jacob et son face-à-face avec Dieu traduisent son intimité et son attachement au créateur. Jacob demande la bénédiction de Dieu et Dieu lui confère un nom nouveau, signe de la place de choix qu’il va désormais occuper selon le plan divin dans la réalisation des promesses faites à Abraham. Tout cela trace un programme de vie pour toi Sœur Wendyam et constitue un appel pour vous chères moniales. Chère Wendyam, en t’engageant dans la vie monastique, le Seigneur t’invite à cultiver cette intimité profonde avec lui dans la contemplation et la prière et à lui porter le monde, l’Église par l’offrande perpétuelle de ta louange et de ton sacrifice quotidien. Cette force, tu la puiseras en Jésus Eucharistie, dévotion eucharistique qui caractérise d’ailleurs fortement ta famille religieuse. C’est la mission qu’il te confie en ce monde, mission indispensable pour la fécondité apostolique de l’Église et pour le salut de l’humanité. Sois donc avec tes sœurs, un instrument du Seigneur pour participer pleinement dans le silence et la prière, au salut de l’humanité.

II- La consécration religieuse : témoignage évangélique et appel à la sainteté

Par le bain du baptême qui est la toute première consécration chrétienne, Dieu selon Saint Paul, « nous a fait renaître et nous a renouvelés dans l'Esprit Saint. Il l'a fait dans sa miséricorde, et non pas à cause d'actes méritoires que nous aurions accomplis par nous-mêmes. » (Tt 3,4-7). Par le baptême, Dieu nous introduit gratuitement dans une vie nouvelle et nous remplit de l’Esprit Saint pour nous sanctifier. La consécration religieuse se fonde sur cette consécration baptismale et engage les religieux, par la profession des conseils évangéliques, à vivre la radicalité de l’évangile et grandir dans la sainteté.

Chère Sœur Wendyam et vous chères sœurs, par votre profession, vous exprimez votre volonté de livrer toute votre vie, et votre personne à l’Amour de Dieu, « l’unique nécessaire. » « Si le grain de blé ne meurt, il reste seul mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits.» Nous prions notre Bien Aimé Frère et Seigneur Jésus pour vous, en cette eucharistie afin que vous mouriez à vous-mêmes pour n’être qu’à lui seul et pour accomplir ainsi sa volonté.

La pauvreté évangélique.

« Bienheureux ceux qui ont une âme de pauvre car le Royaume des cieux est à eux.»(Mt 5,1).

A la suite du décret conciliaire Perfectae caritatis (n° 13), le Code de droit canonique stipule que le conseil évangélique de pauvreté, à l’imitation du Christ qui de riche qu’il était s’est fait pauvre pour nous, comporte, en plus d’une vie pauvre en faits et en esprit, laborieuse et sobre, étrangère aux richesses de la terre, la dépendance et la limitation dans l’usage et la disposition des biens, selon le droit propre de chaque institut (cf canon 60). Par le vœu de pauvreté, la religieuse fait de Dieu son seul trésor. « Là où est ton trésor, là aussi se trouve ton cœur », nous rappelle Jésus. Puissiez-vous alors vous attacher totalement au Christ, mettant toutes vos énergies en branle pour le chercher et pour n’être qu’à lui seul.

La chasteté consacrée

A la suite de Jésus qui les appelle, les religieuses consacrent totalement leur vie, offrent leur cœur et tout leur être à Dieu, en renonçant aux joies de l’amour conjugal, familial à « cause du Royaume des Cieux », c’est-à-dire pour l’annonce de la Bonne Nouvelle… « Celui ou celle qui n’est pas marié a souci des affaires du Seigneur. » (1 Co 7,52). Un tel vœu, qui est don de Dieu à son Église, revêt une signification particulière. Il annonce la radicalité et la primauté du Royaume de Dieu… sur les réalités et les valeurs de ce monde qui passe ! Comme nous le demande le saint Pape Jean-Paul II, n’ayons de cesse de prier pour tous les consacrés – hommes et femmes – « afin que leur chasteté – signe d’amour préférentiel pour Jésus-Christ – soit vécue dans la plus grande fidélité et soit une révélation de la tendresse de l’amour gratuit et universel, révélation de la tendresse même de Dieu pour tous les hommes » (Cf. Jean Paul II, aux religieux/ses, 16 mai 1980).

L’obéissance par amour

Le troisième vœu qui est celui de l’obéissance par amour exprime le désir de ne chercher que la volonté du Père, à la suite de Jésus « descendu du ciel pour faire, non sa volonté, mais la volonté de celui qui l’a envoyé.» (Jn 6, 38). « L’obéissance, disait Charles de Foucauld, est la mesure de l’Amour. » Le vœu d’obéissance engage la religieuse à soumettre sa volonté à l’Église, aux constitutions, aux supérieures légitimes lorsqu’elles commandent suivant les constitutions de l’Institut.

En somme, le Concile Vatican II (cf. L.G. 44) retient que par les vœux de pauvreté évangélique, chasteté et obéissance, la religieuse est « entièrement livrée à Dieu » ; elle « appartient totalement à Dieu » et doit « demeurer propriété exclusive de Dieu. » Elle aime Dieu plus que tout et se rend disponible pour le service du Royaume à un titre nouveau et particulier. Outre la profession de ces conseils évangéliques, la vie monastique que vous avez embrassée et dans laquelle Sœur Wendyam va bientôt s’engager, doit s’efforcer de « concilier harmonieusement la vie intérieure et le travail dans l'engagement évangélique de la conversion des mœurs, de l'obéissance et de la stabilité, ainsi que dans la pratique assidue de la méditation de la Parole (lectio divina), de la célébration de la liturgie, de la prière » (Vita Consecrata, n. 6)

III- Interpellation à toute la famille religieuse

Chères sœurs, votre Famille Monastique est née le 1er Novembre 1950, place Saint Pierre à Rome, lors de la promulgation du Dogme de l’Assomption de la Vierge et vous avez votre charisme propre en tant que contemplatives. En substance, ce charisme se résume en une vie de contemplation du visage de Jésus et du Père invisible et caché, avec comme sources : l’évangile, l’exemple de la Vierge Marie ; tout cela est vécu sous la mouvance de l’Esprit-Saint.

L’année de la vie consacrée est une opportunité, un tremplin pour un retour aux sources de ce charisme et de cette spiritualité en vue d’un renouveau intérieur de votre famille. Selon l’enseignement de l’Église, les monastères doivent être au cœur de l’Église et du monde, des signes éloquents de communion, des demeures accueillantes pour ceux qui cherchent Dieu et les réalités spirituelles, des écoles de foi. Votre vie monastique est d’ailleurs caractérisée par le silence, la solitude et la communion fraternelle, la prière continuelle et les célébrations liturgiques, le travail manuel. Vous êtes interpellées à intensifier cette vie hautement évangélique et à faire ainsi de vos monastères des « oasis » spirituelles où des âmes assoiffées de Dieu viendront y puiser des forces dans une rencontre fructueuse et amoureuse avec le Christ. Ce n’est qu’à ce prix que votre famille, à travers sa vie et son charisme, pourra être au cœur de l’Église, la flamme qui, cachée dans le silence et la prière, brûle, brille et embrase le monde pour la gloire de Dieu et le salut des âmes.

Pour terminer, je vous invite à contempler la figure de Marie pour qui vous avez une dévotion particulière dans votre Institut. Elle est l’humble servante du Seigneur, celle qui a vécu intimement uni à son Fils Jésus dans sa mission. Marie demeure un modèle sublime de vie contemplative, elle qui gardait tous les événements de la vie de Jésus et les méditait dans son cœur. Sœur Wendyam et vous toutes chères moniales, mettez-vous à son école et elle vous conduira à la véritable contemplation. Que par la prière de Marie, Dieu vous donne d’avancer toutes en eau profonde dans la sainteté et l’intimité avec le Christ qui vous a consacrées à son service. Daigne le Seigneur, par la présente Eucharistie combler de grâces la Sœur W. Marie et soutenir fermement ses pas dans son engagement de ce jour. La paix du Seigneur soit toujours avec vous.

+Philippe Cardinal OUEDRAOGO,
Archevêque Métropolitain de Ouagadougou

 

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