Pèlerinage Marial Annuel National du Bénin

(Dassa-Zoume, 19-21 août 2016)

 

Excellence Monsieur le Président de la République du Bénin,
Excellence Monseigneur Mgr Brian Udaigwe, Nonce Apostolique au Bénin et au Togo,
Excellence Monseigneur Antoine GANYE, Administrateur de l’Archidiocèse de Cotonou et Présidence de la Conférence Épiscopale de Bénin,
Monseigneur Roger HOUNGBEDJI, Archevêque nommé de Cotonou,
Excellences et chers frères dans l’épiscopat,
Chers prêtres, religieux, religieuses et catéchistes,
Chers frères et sœurs en Christ et en humanité,
A vous tous, grâce et paix de la part de Dieu notre Père et de notre Bien Aimé Seigneur Jésus Christ!

A l’instar de la Bienheureuse Vierge Marie, Notre Dame de Dassa-Zoume, je voudrais joindre ma voix à la vôtre pour chanter le Magnificat : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur. Le Puissant fit pour moi des merveilles ; saint est son Nom ! » (Lc 1, 46). Oui ! Béni soit le Seigneur qui nous donne de vivre en Église-Famille de Dieu, cette 62ème édition du Pèlerinage Marial Annuel National de Dassa-Zoume. Cette opportunité est pour moi la première de présider le Pèlerinage Marial de Dassa-Zoume et de concélébrer avec mes Frères-Évêques du Bénin.

Aussi voudrais-je, en mon nom personnel et au nom de toute l’Église Famille de Dieu au Burkina Faso, saluer avec déférence et reconnaissance les Autorités ecclésiastiques et civiles ici présentes.

En tout premier lieu, nous exprimons nos sincères félicitations à Son Excellence Monsieur Patrice TALON, Président de la République du Bénin nouvellement élu, ainsi qu’à tout son Gouvernement et à ses collaborateurs et leur donnons l’assurance de notre prière. Puisse le Seigneur faire de vous de bons et fidèles serviteurs du Peuple Béninois et rendre féconde votre délicate et irremplaçable mission.

J’adresse aussi toutes mes vives félicitations à Son Excellence Monseigneur Brian Udaigwe, Nonce Apostolique au Bénin et au Togo et lui donne l’assurance de ma communion fraternelle, dans le service généreux de l’Église. Excellence, c’est une joie pour moi de Vous revoir après une vingtaine d’années, à l’occasion de mon ordination épiscopale en 1996. Soyez notre interprète pour traduire au Saint-Père François le soutien indéfectible, par la prière, la communion affective et effective des fils et filles de l’Église Famille de Dieu en Afrique dans l’accomplissement de son ministère pétrinien en faveur de l’Église universelle.

A son Excellence Monseigneur Antoine GANYE, Administrateur de l’Archidiocèse de Cotonou, Président de la Conférence Épiscopale du Bénin, ainsi qu’à tous les Pères Évêques du Bénin, j’exprime ma sincère gratitude pour l’aimable invitation à présider le présent Pèlerinage Marial National de Dassa-Zoume. A Monseigneur Roger HOUNGBEDJI, Archevêque nommé de Cotonou, mes vives félicitations et l’assurance de notre prière pour un fécond ministère épiscopal. Daigne le Seigneur par Marie, nous combler en renforçant la communion et la coopération missionnaire entre nos Églises particulières d’Afrique.

Frères et sœurs bien-aimés, me voici parmi vous. Ensemble, nous allons vivre un moment exceptionnel en célébrant le Saint Sacrifice Eucharistique, à l’occasion de la 62ème édition du Pèlerinage Marial National de Dassa-Zoume. Merci à tous et à toutes d’avoir fait l’effort pour être là ce matin, à Arigbo, haut lieu de prière et de piété mariale, voulu et inauguré par Monseigneur Louis Parisot depuis le 11 février 1954, soit 62 ans. Vous avez certainement beaucoup à dire et à demander au Seigneur par notre Mère du Ciel, la Vierge Marie. Mais qu’est-ce que le Seigneur aurait à vous dire par la Vierge Marie, Mère de Jésus et notre Mère, « Mère de la Miséricorde ».

La Parole de Dieu proposée à notre méditation de ce jour béni constitue un message qui nous interpelle individuellement et communautairement.

1. L’universalité du salut

La liturgie de ce 21ème dimanche de l’Année C est une louange à Dieu en raison de son salut qu’il offre à tous, hommes et femmes. Dans l’Évangile (Lc 13, 22-30) un interlocuteur anonyme pose une question fondamentale à Jésus : « Seigneur, n’y aura-t-il que peu de gens qui seront sauvés ? ». Sont-ils vraiment peu nombreux ceux qui sont sur la voie du Salut ? Quel sera le nombre des sauvés ? La question est digne d’intérêt, même pour nous chrétiens d’aujourd’hui. Qui d’entre nous seront sauvés ?

Du temps de Jésus, les Rabbins étaient divisés sur cette question. Les uns, optimistes, répondaient que : « Tous les Israélites (Hébreux) auront part au monde futur » ; d’autres, plus pessimistes, déclaraient que « ceux qui périssent sont plus nombreux que ceux qui seront sauvés » (cf. Esdras 9, 15).

De nos jours, certains mouvements spirituels, se basant sur le passage de l’Apocalypse 7,4, soutiennent qu’il n’y aura que 144 000 sauvés dont ils espèrent faire partie ! Il y a de quoi laisser perplexe et interrogateur : le ciel serait-il une demeure aux capacités si limitées où les places seraient réservées à un nombre infime ?

Heureusement pour nous, Jésus déplace la question. Il ne s’attarde guère sur le nombre ; il répond en indiquant plutôt le moyen, c’est-à-dire les conditions pour parvenir au salut. Jésus veut nous rassurer : beaucoup viendront des quatre coins de l’horizon. C’est dire qu’une foule immense prendra place au festin du Royaume de Dieu. Infini sera donc le nombre des sauvés. L’Évangéliste Saint Luc souligne bien que le salut de Dieu est pour tous. Et il met en garde les premiers arrivés qui ne doivent pas jalouser et repousser les derniers venus. Dans le mystère de l’amour miséricordieux du Seigneur, « les derniers peuvent être premiers, et les premiers seront derniers » (Lc 13, 30; Mt 20, 16).

2. Conditions d’accès au Royaume des cieux

Jésus lui-même nous enseigne que les exigences du Royaume sont dures, à la limite des capacités de l’homme. « Il est plus facile à un chameau de passer par un trou d’aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume des Cieux » (Mt 19, 24). En entendant ces paroles, les disciples étaient profondément déconcertés et c’est à juste raison qu’ils se demandaient : « Qui donc peut être sauvé ? »

Dans l’Évangile de ce jour, Jésus affirme que l’accès au Royaume est ouvert à tous… d’où qu’ils viennent ; ce qui importe, pour y entrer, ce n’est point l’appartenance à un peuple, à une race, à une pratique religieuse… On ne peut se prévaloir de prétendus liens avec Jésus… tels avoir mangé avec lui, prêcher en son nom, avoir exercé des responsabilités ecclésiales, etc. L’accès au Royaume ne sera accordé qu’à ceux qui, au cours de leur vie, auront fait le bien. Le maître de maison fermera la porte à tous ceux qui « font le mal ». On peut rester dehors, être interdit d’entrer et même rejeté parce qu’on a « fait le mal ». A ce propos, les interpellations du prophète Isaïe (66,2-4) restent d’actualité.

- « Celui qui attire mes regards, c’est l’affligé, le cœur contrit, qui craint ma parole.

- Rien ne sert d’immoler un bœuf en sacrifice si l’on tue un homme

- Rien ne sert de brûler l’encens, si l’on vénère les idoles ».

Revendiquer le titre de disciple de Jésus, en d’autres termes se dire chrétien ne sert à rien si par ailleurs, nous ne changeons pas de comportement, si nous ne nous convertissons pas pour vivre selon l’Évangile de l’amour et de la miséricorde… Le disciple, le chrétien authentique, c’est celui qui s’efforce « d’entrer par la porte étroite », de vivre selon les valeurs de cet Évangile de l’amour et de la miséricorde, selon l’enseignement de l’Église, selon la volonté de Dieu, les commandements de Dieu…

L’universalité du don du salut va donc de paire avec l’exigence de répondre à l’appel de Dieu par une vie livrée à sa grâce. Dans ce sens, tout l’enseignement de la Parole de Dieu de ce dimanche se condense dans la figure de la Bienheureuse Vierge Marie, Notre Dame de Dassa-Zoume dont nous sommes venus implorer l’intercession, elle qui est pour nous chrétiens la « Stella maris », l’Étoile de la mer qui brille dans l’horizon, accompagne les voyageurs de la vie que nous sommes et nous indique le bon chemin.

3. Marie, Mère de la Miséricorde, Étoile brillante sur notre chemin

Comme l’a si bien rappelé le Pape François, Marie, près de la Croix de son Fils « est témoin des paroles de pardon qui jaillissent des lèvres de Jésus » et en cela, elle « atteste que la miséricorde du Fils de Dieu n’a pas de limite et rejoint tout un chacun sans exclure personne » (Misericordiae Vultus, n.24). Toute la vie et le destin de Marie sont par ailleurs l’expression de la cinglante revanche de la grâce et de la miséricorde sur le péché de l’homme. Ce qui est advenu en elle, depuis les premiers moments de sa conception jusqu’à sa glorification dans le ciel, rappelle à l’humanité avec insistance que Dieu aime tous les hommes et veut que tous soient sauvés. Mais en même temps, la vie de Celle par qui la Miséricorde de Dieu s’est manifestée dans le monde, nous rappelle que c’est par nos vies offertes, c’est-à-dire, par nos actes et nos gestes que la Miséricorde de Dieu veut encore s’incarner dans le monde et prodiguer sa générosité aux hommes de notre temps.

Chers frères et sœurs,

Notre vie de croyants est un évangile vivant qui s’ouvre en tout lieu et en tout temps à la lecture des hommes, partout là où nous voulons bien garder ses pages ouvertes. Comme Marie, il nous revient de donner aux hommes de notre temps de contempler partout et d’expérimenter cette présence aimante de Dieu, qui bouleverse la vie, et ce, à travers les œuvres concrètes de miséricorde que le Saint-Père nous recommande de manière particulière à l’occasion du Jubilé de la Miséricorde. Il s’agit d’abord, comme nous le savons, des sept œuvres de miséricorde corporelles : donner à manger à ceux qui ont faim, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, loger les pèlerins, visiter les malades, visiter les prisonniers, ensevelir les morts. Il s’agit ensuite des sept œuvres de miséricorde spirituelles : conseiller ceux qui doutent, enseigner ceux qui sont ignorants, réprimander les pécheurs, consoler les affligés, pardonner les offenses, supporter patiemment les personnes importunes, prier Dieu pour les vivants et les morts.

Dans l’Afrique des temps actuels, vivre la solidarité, autrement dit prendre soin de l’autre, de son frère, de sa sœur porter son fardeau demeure nécessaire pour qu’advienne un monde de paix, de justice et de réconciliation, condition « sine qua non » pour qu’advienne le Royaume de Dieu.

Toutes les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles se résument parfaitement comme témoignage concret et visible de « l’amour et de l’option préférentielle pour les pauvres ». Dans son Exhortation Apostolique Evangelii Gaudium (n°198), le Pape François rappelle avec fermeté que cela représente une question fondamentale de l’Évangile. Notre Seigneur Jésus Christ s’est identifié lui-même aux pauvres (cf. Mt 25,35-36).

En cette année jubilaire de la Divine Miséricorde, tous les baptisés sont invités à ouvrir les yeux et les cœurs pour voir et être des instruments de miséricorde de Dieu envers les pauvres, les petites, les malades, les chômeurs, ceux qui sont accablés par la souffrance, opprimés par les injustices multiformes… A l’instar de la Vierge Marie face à sa cousine Elizabeth, adoptons « un style de vie » dont le centre de gravité n’est pas nous-mêmes, mais les autres. C’est dire que nous sommes invités à nous poser la question : « Qui est mon prochain ? », à aider, à aimer… Comme nous le recommande le Pape François, « dans la logique de l’Évangile, nous ne devons pas cataloguer les autres pour décider qui est mon prochain et qui ne l’est pas. » Il dépend de chacun de nous, d’être ou de ne pas être le prochain de la personne que je rencontre et qui a besoin de mon aide fraternelle, même si elle n’est pas de ma parenté, de mon ethnie, de ma religion, de mes options socio-politiques…

Frères et sœurs bien-aimés, en cette Année Jubilaire, n’ayons de cesse d’invoquer la Bienheureuse Vierge Marie, « Mère de Miséricorde ». « Que la douceur de son regard nous accompagne en cette Année Sainte, afin que tous puissent découvrir la joie de la tendresse de Dieu. Personne n’a connu comme Marie la profondeur du Dieu fait homme. Sa vie entière fut modelée par la présence de la Miséricorde faite chair. La Mère du Crucifié Ressuscité est entrée dans le sanctuaire de la miséricorde divine en participant intimement au mystère de son amour » (Misericordiae Vultus, n°24).

« Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7). Puisse la célébration Eucharistique de cette 62ème édition du Pèlerinage Marial Annuel National de Dassa-Zoume, nous renouveler profondément, en nous donnant un cœur nouveau et un esprit nouveau,

- Pour accueillir et vivre la miséricorde de Dieu,

- Et être des instruments concrets et efficaces de la tendresse de Dieu, pour bâtir ensemble une société plus réconciliée dans la justice véritable et une paix durable, gage d’un monde plus digne de Dieu et des Hommes. Amen !

A tous et à toutes, bon et saint pèlerinage Annuel !!!

+Philippe Cardinal OUEDRAOGO
Archevêque Métropolitain de Ouagadougou

 

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